Le luxe ne s’arrête pas à certains humains, il n’est pas une propriété, un privilège, un droit ou une idée. Le luxe est naturel. Chaque chose de ce monde est une expression luxueuse. La vie est luxe, Dieu est luxe, tu es luxe.
Au cœur de cet univers d’abondance luxuriante l’esprit humain a inventé la rareté. Par ici nous l’expérimentons, à différents niveaux, plus ou moins intensément. Là-bas, au loin, des êtres la vivent dans leurs os, dans l’air pénétrant leurs poumons abîmés de corps décharnés. Le manque se dessine partout, sur tous les continents, sur les visages d’enfants, dans les ventres de mamans.
Le manque que je te lance dans un regard jaloux, des mots coléreux, un silence étouffant. Ce manque-là, celui auquel je crois quand je pense que ça ira mieux plus tard, que je trouverai la paix dans un objet, un état, une nouvelle présence ou dans l’absence, c’est ce manque qui s’étend jusqu’à toi, qui te raconte que tu ne peux pas, que tu ne devrais pas, qu’il faudra, un jour, faire comme ça, avancer contre ton cœur, blesser quand tu veux aimer, enlever quand tu veux donner, rejeter quand tu veux inviter.
Vois-tu qu’il n’y a aucune ligne, aucune frontière entre le manque d’eau dans le corps d’un enfant au regard suppliant et celui qui sévit dans ta vie, dans tes doutes, tes compromis ?
Tu crois peut-être qu’un jour tu vivras, un jour enfin, tu respireras entièrement, tu souriras, tu danseras. Un jour tu mourras. Et ce jour-là, qu’est-ce qui changera ? Qu’est-ce qui comptera ? Dis, ce jour-là, qu’est-ce qui manquera ?
Marcher dans ce monde de guerres, de pauvreté, d’injustices, de haines, de souffrance, d’ignorance, marcher sur cette terre le ventre vide, le regard avide, avide de vie, de luxe, calme et volupté.
Je ne veux pas ça, non, je ne veux pas.
Je veux reconnaître, je veux naître à nouveau, maintenant, avec toi.
Naître ici, contre le sein de la vie qui nourrit, qui comble tous les appétits, apaise les esprits. Je veux me réveiller, maintenant, me souvenir de la nature, de cette nature qui n’est pas seulement dans les bois, les fleurs, en toi, à côté de moi mais qui est là en moi, qui n’a jamais été hors de quoi que ce soit.
Je veux vivre un luxe entier, une infinie beauté, une douceur sans heurts.
Je veux m’éveiller à ce corps.
Corps de luxe
calme
et volupté.